vendredi 21 août 2020

La vie de façade de la famille Armont

La vie de façade de la famille Armont

 

                On y est enfin. Tout le monde s’ambiançait. La musique était assourdissante et au goût de tous. J’en profitais pour me déhancher follement comme me permettait mon âge. C’était le mariage de mon cousin, Jean Lou. J’oubliais presque la colère et les cris d’il y a une heure. Arnaud le faisait toujours avant toutes sorties. C’était comme un rituel pour lui, un rituel qu’il nous imposait. Mes yeux s’y sont très vite habitués. On ne pouvait plus savoir si j’avais pleuré ou pas. Après une heure je n’avais plus les yeux rouges ou gonflés.  

 

                Comme pour toutes les fêtes de famille, les enfants et les adolescents étaient séparés sur une table loin des adultes. Ils voulaient peut-être parler de choses d’adulte. J’avais déjà eu vent de ce qui se disait à cette table. Après des litres d’alcool écoulaient, les patriarches s’amusaient à comparer leurs progénitures.

« Ma fille a eu le premier prix de littérature de son collège » fit un de mes oncles. Mon père éclata de rire. « Ta fille n’arrive même pas à la cheville des miennes. Si je devais juste énumérer le quart de ce qu’elles ont pu réaliser, tu me prendrais pour un menteur. Ce sont de vrais petits génies et elles font ma fierté ». « Et pourtant on sait bien que tu les aurais toutes échanger pour un seul petit bonhomme qui perpétuerait ta ligné. Dommage alors ! ». D’un air dédaigneux Arnaud répliqua « Tu ne crains rien de ton côté mon cher frère. Il te faudra d’abord construire un royaume avant de penser à un l’héritier. » Je ne savais pas à ce moment que cette petite guerre entre les chefs de famille bâtirait une haine profonde qui perpétuera dans nos veines. A cette l’époque on ne souciait pas de tout cela. On profitait de ces rares moments en famille. Papa, Arnaud toujours les yeux rivés sur son téléphone. Son univers était aimé par la volonté de tout contrôler, de tout réussir. Les sorties en famille n’incluaient pas toute la famille malheureusement. Iris n’y était jamais conviée. Anneleese y était aussi rarement présente qu’Arnaud mais était tout sauf la copie conforme de notre père. Elle était passionnée de sport, membre de l’équipe nationale d’athlétisme et de handball. Arnaud avait toutes les raisons d’être fière de sa cadette mais malgré toutes les competitions qu’elle a pu faire Arnaud était toujours absent. Elle étouffait sa frustration dans le sport. Ça devait lui faire du bien de se tuer sur la piste au lieu d’affronter cette réalité. Elle aussi était victime de ce pervers narcissique, on l’était toutes. Il tenait à garder le contrôle de sa tribu. Savait-il seulement nous aimé ?

 

                Annielle, la seule à pouvoir interrompre la discussion des adultes sans se prendre une gifle. C’est bien la fille préférée de son père. Celle qui ressemble tellement à la seule femme qu’Arnaud n’ait jamais aime, Sa chère mère. Et pourtant elle n’était pas la seule a ressemblé à grand-mère Anne. Iris était, comme toutes les filles d’Armont, très belle. Elle avait les cheveux d’un noir cendre, avec un regard tellement profond que le plus provocateurs des hommes n’osaient la regarder dans les yeux. Hélas ! Elle n’a pas pu faire usage de cette beauté comme elle l’aurait peut-être voulu. A l’âge de 5 ans, elle fit un grave accident en jouant sur son tricycle juste devant la maison. Suivi ainsi des poursuites judiciaires contre la gardienne et des heures interminable a reste immobile sur son lit d’hôpital. Elle ne pouvait plus jamais remontée sur un tricycle, ni marcher, ni jouer. Depuis ce jour, elle ne vit que le jardin de l’arrière-cour. Arnaud n’aimait pas Iris et il ne s’en cachait pas. Il disait souvent « Qu’est-ce qu’on a pu faire au bon dieu pour mériter ça ? », « Cécile, que va-t-on faire d’Iris lorsque toutes les filles seront mariées et auront leur propre foyer ? Je pensais mettre au monde des enfants qui pourront prendre soin de moi lorsque je serais vieux mais la… Je me retrouve avec un boulet à trainer jusqu’à la mort. »  Elle était paralysée des jambes et lui, démuni de cÅ“ur.

« Ta tribu n’est pas au complet Arnaud, elle ne l’est jamais » fit un oncle, un peu trop imbibé d’alcool pour lire l’expression de gène qui se dessinait sur le visage de ma mère.

« Tu me parles de qui Georges ? Anneleese avait ses entrainements. Elle ne les rate jamais pour rien au monde »

« Et Iris ? Elle est ou la petite Iris ? Ça fait des années qu’on ne la voit plus. Ne me dit pas que tu l’as enterré quelque part ? » Ces quelques mots furent accompagnés d’un rire, et d’autres rires plus malaisant de la femme de cet oncle.

Tante Gladys : « Parlons d’autres choses tu veux bien. Et les affaires Arnaud ? Toujours aussi florissantes ? »

Oncle Georges : « N’oublies pas tes promesses à Kate pour ses 20 ans. Je sais bien que tu es un homme de parole et que tu vas tout faire pour l’aider à partir en France pour ses études. » La conversation repris vite de bon train et dans la bonne humeur. Rien ne pouvait gâcher cette belle soirée.  Arnaud comme toujours était celui qui faisait le discours pour les nouveaux mariés. C’était un honneur pour la famille d’affichait un exemple de réussite aux yeux du monde. Du moins c’est ce que je pensais à cet instant. Après le discours, le marié rejoint la table des adultes. Il y était certainement en stage. Ne devait-il pas aussi hisser fièrement notre nom et nos couleurs ? Son apprentissage fût rapide. Il démontra sa maîtrise en excluant subtilement sa nouvelle épouse lors des conversations houleuses des patriarches. Elle finira par comprendre le fonctionnement de la famille, elle le devra.

 

    De retour dans notre monde. Dans ce monde que j’osais me dire prisonnière et soudainement je repensais à Iris. Il me faudra comme à chaque fois tout lui raconter. Je n’oubliais jamais les détails, de la décoration florale, des housses de chaises de la couleur pèche, des demoiselles d’honneurs ayant légèrement abusées du maquillage. Je repassais tout a la loupe. Anneleese était déjà à la maison. Un roman à la main au chevet d’Iris, elle lisait une page et elles en débâtaient durant des heures. Aucun roman n’a pu y échapper. Maman entra dans la chambre et d’un geste inintéressé elle embrassa le front d’Iris. « Ne tardez pas trop les enfants, Il faut aller se coucher. On est tous épuisé. » Je me blottis tout prêt d’iris « Je vais dormir ici ce soir. J’ai tellement de chose à lui raconter et je ne voudrais rien oublier. » Maman était déjà partie et Anneleese aussi. Elle avait entrainement tous les jours et devait dormir pour reprendre des forces. Comme promis, j’ai pu tout raconté à Iris. Elle s’y sentait presque. Ça faisait des années qu’elle n’avait pas vu la famille donc j’essayais tant bien que mal de lui décrire. « Oncle George est toujours aussi gros. Je pense qu’il mange toute la nourriture de la tante Gladys. Elle paraissait toute maigre, avec des yeux tous noirs, certainement à cause de son mascara. Elle qui est aussi gentille qu’une sorcière, elle commence à y ressembler. » Cette soirée qui avait commencé avec des pleures finit avec de grands sourires.

 

 

               

 

 

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